“Né d’aucune femme” – Franck Bouysse

“Né d’aucune femme” – Franck Bouysse

Titre : Né d’aucune femme
Auteur : Franck Bouysse
Format : papier
Nombre de pages : 336
Editeur : La manufacture de livres
Dates de lecture : 21/01/2020 – 27/01/2020
Ressenti : Coup de cœur

4ème de couverture / Résumé éditeur :
” Mon père, on va bientôt vous demander de bénir le corps d’une femme à l’asile.
— Et alors, qu’y-a-t-il d’extraordinaire à cela ? demandai-je.
— Sous sa robe, c’est là que je les ai cachés.
— De quoi parlez-vous ?
— Les cahiers… Ceux de Rose.”
Ainsi sortent de l’ombre les cahiers de Rose, ceux dans lesquels elle a raconté son histoire, cherchant à briser le secret dont on voulait couvrir son destin. Franck Bouysse, lauréat de plus de dix prix littéraires, nous offre avec Né d’aucune femme la plus vibrante de ses œuvres. Ce roman sensible et poignant confirme son immense talent à conter les failles et les grandeurs de l’âme humaine.

Mon avis :
Sortir de sa zone de confort peut vous amener à découvrir des pépites. C’est ce qui s’est passé pour moi avec ce roman. Sorti il y a un an, je l’ai vu passer à maintes reprises sur Instagram sur lequel il était majoritairement encensé. J’ai trouvé sa couverture à la fois belle et intrigante et son titre pour le moins énigmatique. Je l’ai prêté à ma mère qui l’a lu en deux semaines (un temps record pour elle qui met toujours beaucoup de temps pour finir un livre) et m’a dit à quel point elle l’avait aimé. Il ne m’en fallait pas plus que je le mette tout en haut de ma pile à lire afin qu’il soit ma prochaine lecture.

Franck Bouysse ne donne pas de date mais à la lecture, on devine que l’histoire se passe vraisemblablement au XIXe siècle (je dirais vers la fin) voire au début du XXe. Ce qui m’a étonnée, c’est que Rose soit lettrée. Elle vient d’une famille pauvre de paysans et je pensais que les enfants de ce milieu étaient rares à savoir lire et écrire (on lui demande clairement au début du roman, alors qu’elle a 14 ans, si elle sait lire ce à quoi elle répond par l’affirmative), on apprend au cours de la lecture comment elle a appris.

Ce roman, une fois que vous l’avez commencé, vous ne pouvez plus le refermer.

J’ai beaucoup apprécié sa construction avec des chapitres alternant le “témoignage” des différents protagonistes. Chacun a un style bien à lui et une façon différente de relater les choses. De plus, tout n’étant pas dit dans les carnets de Rose, ce que nous racontent les autres personnages fait la lumière sur certains événements et nous permet d’appréhender leur ressenti.

Rose est extrêmement touchante dans ses propos. Elle se montre à la fois naïve et très mature face à ce qui lui arrive, ce qu’elle subit. Elle est en même temps vivante, intelligente, elle cherche à comprendre, à trouver de quoi l’aider à sortir la tête de l’eau. Dès le début, on comprend que le “château”, comme elle l’appelle, ne va pas être un havre de paix. On se doute bien de ce que le maître a prévu pour elle. Malgré tout, on ne peut s’empêcher de souffrir avec Rose, d’avoir le cœur qui se serre lors des ignominies qu’elle subit. Cet homme est un monstre, il n’y a pas d’autres mots pour le qualifier. Grâce à Edmond, le palefrenier, elle voit un peu de bleu dans son ciel si noir, il lui fait espérer un avenir mais sa lâcheté la renvoie à la dure réalité.

Je ne connaissais pas la plume de Franck Bouysse et je l’ai trouvée très belle, très maitrisée, il sait faire passer les émotions à travers elle, il nous fait vivre aux côtés de ses personnages. Ce roman noir est, paradoxalement, très beau, d’une richesse incroyable comme on en voit peu. Et puis il y a cette fin qui a réussi à faire naitre un sourire sur mes lèvres…

Un coup de cœur comme j’en ai peu.

Citations :
“Au fur et à mesure que je montais les escaliers, j’essayais de me vider, de me vomir moi-même pour qu’il reste rien d’un corps que j’aurais pu abandonner au maître le temps qu’il fasse son affaire.”

“Je possédais encore un corps avec des bras, des jambes et une tête pour penser, mais en vrai j’étais morte, enfermée, bien décidée à laisser fondre le dedans de ma tête pour qu’on puisse plus rien me prendre.”

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